lundi 13 mars 2017


Quatre ans après la disparition de Chavez, le Venezuela est orphelin de Chavez. Lapalissade ? Non, absence abyssale. 

Une majorité de Vénézuéliens désapprouve la politique économique du gouvernement (en a-t-il une ?) et ses conséquences pour la vie quotidienne, surtout des classes populaires.
L’inflation galope à des taux inouïs, le prix très excessif des produits y compris de première nécessité, et la pénurie organisée par les classes dominantes, obligent à spéculer, à recourir au marché noir (« el bachaqueo »), font de la vie de tous les jours une galère pour s’approvisionner ; des queues interminables, de la colère qui gronde... Cette fuite en avant de/dans l’inflation, de la hausse des prix, provoque de fortes tensions sociales. Le gouvernement a décidé désormais de ne plus subventionner les produits mais les personnes (augmentations des salaires...)

La gauche du chavisme, du parti PSUV (une énorme auberge espagnole) envisage de possibles explosions sociales. Elle exige des mesures efficaces, l’approfondissement du processus révolutionnaire « en panne », une plus grande politisation, la relance de l’impulsion populaire, la prise en compte des revendications des bases chavistes dont « l’appareil » se méfie... Des militants anticapitalistes ont été mis sur la touche... La « guerre économique » ravage le pays. Face à l’offensive déstabilisatrice de l’oligarchie et des anti-chavistes, les bases chavistes critiquent « l’immobilisme » du président et du gouvernement, qui n’auraient pas rompu avec le capitalisme encore hégémonique.

Vu de loin, (et attention aux filtres de la désinformation permanente !) le président Maduro paraît faire du surplace, mais si l’on y regarde de près, il a marqué des points dans le permanent et terrible bras de fer avec une opposition disparate mais prête à tout , agressive, majoritaire au parlement depuis décembre 2015. L’opposition n’a pas respecté les délais pour convoquer un référendum révocatoire (article 27 de la constitution) ; à finasser, à faire du chantage, elle a finalement perdu... Le président Maduro continue, prolonge, les « missions », les programmes sociaux du chavisme, construit des dizaines de milliers de logements populaires (359 000 en 2016), consacre 71,4% du budget national aux investissements sociaux. 90% des personnes en âge d’en jouir perçoivent une pension de retraite (19% seulement avant la révolution). Le Venezuela comptait 65% de pauvres en 1999. Le taux a diminué de plus de la moitié... Mais tout cela ne suffit pas pour éteindre une crise pas seulement économique, pour permettre à la population de « consommer » normalement. Le chavisme a beaucoup apporté au peuple mais n’a pas produit toutes les « valeurs nouvelles », culturelles, humaines, attendues.

Le président Maduro a invité l’opposition au dialogue : c’est elle qui l’a « gelé ». Elle compte sur les élections des gouverneurs et des maires, programmées cette année, pour marquer de nouveaux points. Par une infatigable activité internationale, large, et grâce à l’accord OPEP de novembre 2016, le prix du pétrole est passé de 24 dollars le baril en janvier 2016 à 45 dollars fin décembre 2016. Une bouffée d’oxygène pour le pays... Avec la présidence Trump, les tensions bilatérales se sont déjà accrues et s’est ouverte une période de grande inquiétude et instabilité.

Le nouveau vice-président chaviste, Tarek El Assani, a essuyé une intense et très classique campagne d’accusations, notamment de « trafic de drogue ». Habituel « lavage de cerveaux en liberté », mensonges repris par les médias occidentaux, et « ça marche »...

Dans cette situation dangereuse, explosive, le président Maduro a choisi, avec sang-froid, de préserver la paix, d’éviter que le sang ne coule, de gérer dans l’urgence, dans l’attente des élections générales de décembre 2018.

Jean ORTIZ
L’Humanité.fr, dimanche 12 Mars 2017.

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