vendredi 17 mars 2017

Les leçons du vote néerlandais [commentaire]





  • Aux Pays-Bas, Geert Wilders n’a pas réussi son pari : le repli nationaliste n'a pas séduit les électeurs.
    Aux Pays-Bas, Geert Wilders n’a pas réussi son pari : le repli nationaliste n'a pas séduit les électeurs. | AFP

Pour une écrasante majorité de responsables politiques en Europe, les résultats des élections aux Pays-Bas sont une bonne nouvelle.
La vague de radicalisme qui, en 2016, avait apporté le Brexit et Donald Trump s’est brisée sur le premier écueil continental. Geert Wilders n’a pas réussi son pari. Il progresse, mais est largement distancé par les libéraux. Le plafond de verre européen a tenu contre les extrémistes. On ne peut que s’en réjouir.
Ce résultat tient, pour beaucoup, à des caractéristiques proprement néerlandaises. Le système proportionnel tend à désamorcer la charge subversive du vote contestataire. D’autant plus que les principaux partis avaient annoncé, avant le vote, un front anti-Wilders.
Les spécificités de l’économie des Pays-Bas, l’une des plus ouvertes au monde, créent en outre un contexte très particulier. Les exportations représentent plus de 80 % du PIB et font que trois habitants sur cinq vivent du commerce international. Ce qui rend naturellement les électeurs conscients du risque immédiat que comporterait toute rupture protectionniste. Cette ouverture au marché, avec l’immigration qu’elle exige, expose aussi les Pays-Bas sur deux thématiques sensibles : les travailleurs détachés et l’intégration.
Le vote de mercredi n’a pas été favorable aux partis de gouvernement traditionnels. Les libéraux gagnent en reculant, les sociaux-démocrates sont laminés. Mais il nous dit aussi qu’une très large majorité de Néerlandais rejettent le repli nationaliste. Les partis pro-européens, notamment les Verts, ont progressé. Dans le même temps, si Geert Wilders sera loin du gouvernement, certaines de ses idées y seront représentées. Les marqueurs du patriotisme, de l’identité et de l’intégration ont été, en partie, repris à leur compte par les libéraux et les chrétiens-démocrates.

La dérive extrémiste n’est pas inéluctable

On retrouve, là, une tendance plus générale en Europe : la droitisation des droites de gouvernement. On l’a constaté au Royaume-Uni, où l’agenda des europhobes de l’Ukip a fortement rongé l’agenda conservateur. Au point de le faire sauter dans le brouillard du Brexit. La droite française vit avec ce dilemme depuis plusieurs décennies. La droite allemande le découvre, non sans frayeurs, avec l’émergence de l’Alternative für Deutschland, qui fragilise Angela Merkel sur son aile droite.
Ce que le vote néerlandais nous dit, cependant, c’est que cette dérive vers les extrêmes n’est pas inéluctable. Entre l’ouverture béate de certains mondialistes et les relents fascisants d’une fermeture forcenée au monde, une voie médiane est praticable. Sans renverser la table. À une condition, toutefois. De sortir du déni face à la question migratoire et aux ratés des processus d’intégration sociale. De restaurer une maîtrise de la chose publique sur ces sujets.
Sur ce point, le coup d’éclat de Mark Rutte contre les provocations turques, le week-end dernier, a probablement été payant électoralement. Sa fermeté face à Erdogan a provoqué une crise diplomatique, mais elle a aussi restauré symboliquement une frontière entre démocratie et dictature. En révélant l’étrange effet de miroir qui existe entre les formations d’extrême droite, très actives dans nos pays, et les régimes autoritaires qui nous entourent et veulent s’immiscer.
Le vote batave n’a pas éliminé le vent du trumpisme, mais il a libéré le ciel européen d’une sorte de fatalité. Au fond, le point faible des extrémistes, c’est l’Europe. Leur volonté de la détruire nous expose trop aux dictateurs pour leur confier le volant.

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