dimanche 15 octobre 2017

Chine. De la discrétion à l’affirmation

Lina Sankari
Mercredi, 11 Octobre, 2017
L'Humanité

Le 19e Congrès du Parti communiste chinois, qui s’ouvre la semaine prochaine, entend assumer l’offensive du pays dans le secteur de l’innovation.
«Observons avec calme, garantissons nos positions, gérons les affaires avec sang-froid, cachons nos capacités et attendons notre heure », préconisait le président Deng Xiaoping en 1991. Vingt-six ans plus tard, l’heure de l’affirmation du rôle de la Chine sur la scène internationale semble venue. À un développement qu’il souhaite désormais maîtriser, le pays ajoute une volonté de réduire les inégalités. Le parachèvement d’une société dite de moyenne aisance, concept élaboré par Deng Xiaoping et enrichi par ses successeurs, garantit ainsi la légitimité du Parti communiste chinois (PCC). « Depuis la période impériale, l’État chinois fonde sa légitimité sur la fourniture à la population d’une stabilité, d’une sécurité et d’une protection minimales. Faillir dans ce domaine mettrait en danger le régime politique », explique l’économiste Michel Aglietta.

La Chine a pour objectif de rejoindre les pays innovants

L’idée est ainsi de canaliser un PIB jugé excessif (12,2 % en 2010) autour de 6,5 % et de doubler le revenu moyen par habitant dans les villes et les campagnes par rapport à celui de 2010 avec une augmentation moyenne des salaires de 15 % l’an. La Chine se fixe également pour objectif de rejoindre les pays innovants et d’achever l’industrialisation en réduisant les activités traditionnelles (sidérurgie, construction, production bas de gamme…). Lorsqu’il arrive au pouvoir, il y a cinq ans, Xi Jinping entend parachever le système d’assurance-chômage, renforcer celui de sécurité sociale, qui couvre désormais l’intégralité de la population, et intégrer l’assurance-vieillesse à l’assurance-santé. S’ils diffèrent selon les provinces, les taux de cotisation ont atteint des niveaux proches de ceux pratiqués en Europe.
« Toutes les réformes économiques sont inspirées d’une même idée : confier l’allocation des ressources aux mécanismes du marché concurrentiel ouvert aux entreprises étrangères, en supprimant les monopoles et protections multiples dont bénéficient les entreprises et banques nationales. Mais il est hors de question de le privatiser. Il demeure le pilier du système communiste. Un vrai système d’économie mixte doit se mettre en place, régulé par le marché. L’État conserve la conduite de la politique macroéconomique et de la stratégie à long terme. La planification n’est pas remise en cause », analyse l’économiste Philippe Delalande  (1). Par fusions-acquisitions, l’État chinois opère une concentration d’entreprises – y compris privées – afin d’en faire des leaders nationaux compétitifs sur le marché mondial. Aéronautique, automobile, pharmacie, acier, travaux publics… aucun secteur n’échappe à la règle et les entreprises publiques bénéficient de l’appui des banques pour obtenir plus facilement des prêts. Pourtant, Xi Jinping s’est employé à appuyer les PME, qu’il considère comme un levier d’innovation, grâce à un organisme de soutien et de conseil public pour se lancer sur les marchés internationaux. Pour accroître sa puissance, Pékin a également augmenté considérablement ses investissements directs à l’étranger grâce à la création de quatre fonds publics. L’idée est de contrôler les portes d’entrée dans les pays (ports, entrepôts…), d’acquérir des entreprises en faillite pour transférer l’activité en Chine, des technologies innovantes et de prendre des parts dans des sociétés qui permettront d’exercer un contrôle sanitaire plus étroit sur les produits alimentaires après de nombreux scandales. La stratégie du profil bas énoncée par Deng Xiaoping semble bel et bien avoir vécu.
(1) Auteur de La Chine depuis le Congrès de 2012, L’Harmattan, 2016
Objectif : éradication de la pauvreté à l’horizon 2020
La Chine est entrée dans la phase finale de son plan de lutte contre la pauvreté. Mais, à la veille du 19e Congrès du Parti communiste chinois, le président Xi Jinping, qui sait à quel point la persistance d’inégalités entre les régions menace la stabilité, a demandé aux dirigeants d’intensifier les efforts, lundi. « Il s’agit de la bataille la plus difficile », a-t-il souligné. Fin 2016, 43,35 millions de personnes survivaient toujours sous le seuil de pauvreté du pays, qui est de 2 300 yuans (296 euros) de revenus annuels. Soit environ 3 % de la population. L’objectif d’une éradication totale de la pauvreté d’ici à 2020 devrait être atteint notamment grâce à la consolidation du système de santé.
rubrique internationale

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