mercredi 16 mai 2018


LE MOYEN-AGE CANADIEN

CANAYENS ET EUROPÉENS DE FRANCE :  SOUCHE COMMUNE

Daniel Paquet

MONTRÉAL – « Au moyen âge, (nous avons) des seigneurs, des vassaux, des maîtres de corporation, des compagnons, des serfs et, de plus, dans chacune de ces classes, une hiérarchie particulière.
La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de la société féodale, n'a pas aboli les antagonismes de classes Elle n'a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles conditions d'oppression, de nouvelles formes de lutte à celles d'autrefois.
Cependant, le caractère distinctif de notre époque, de l'époque de la bourgeoisie, est d'avoir simplifié les antagonismes de classes. La société se divise de plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamétralement opposées : la bourgeoisie et le prolétariat.
Des serfs du moyen âge naquirent les bourgeois des premières agglomérations urbaines; de cette population municipale sortirent les premiers éléments en dehors des enceintes soit les premiers éléments de la bourgeoisie. » (Marx, Karl; Engels, Friedrich, Le Manifeste du Parti communiste, Flammarion, Paris, 2008, 228-229)

Que pouvait fuir les colons français qui s’établirent sur les territoires de la Nouvelle-France?  Certainement pas les rigueurs de l’hiver canadien…  C’était sûrement le mode de production de la richesse (essentiellement agricole) de cette colonie française, soustraite des dures corvées des habitants de France, à cette charnière du XVIe siècle et du XVII siècle, dans les provinces occidentales du royaume de France (Bretagne, Normandie, Poitou…) qui  attirait les nouvelles générations d’Europe à braver ce qu’on appelait encore la Mer des Ténèbres au Moyen-Age, i.e. l’Océan Atlantique.
On ne peut croire que les nouveaux colons ont rompu avec les traditions ancestrales.  « Ainsi ce monde populaire est placé au centre de l’histoire aussi bien politique que culturelle.  Politique, parce que le peuple y vivait l’expérience au moins provisoire et utopique de l’universalité. De la liberté, de l’égalité et de l’abondance. » (Boglioni, Pierre, La culture populaire au moyen âge :  thèmes et problèmes, L’Aurore, Montréal, 1979, page 20)

Une œuvre collective majeure fut la création et l’adoption d’une langue commune :  le français des Canayens; langue fondée sur le parler de Paris (le francilien) auquel s’est greffé les divers dialectes, jargons, patois et langages provinciaux et régionaux.  En France, il fallut attendre la grande révolution française de 1789-1793; pour unifier la nouvelle république.

En fait l’histoire du Canada ne débute pas avec l’arrivée des Européens de France qui ont suivi les pêcheurs irlandais, portugais et même plus tôt les Normands.  Les Autochtones sont arrivés par le Nord il y a de cela plus d’une bonne dizaine de milliers d’années.   Les chercheurs tendent à croire qu’ils étaient des millions déjà au moment où les Français se sont installés; mais ils ont été décimés par les carnages et les maladies.  Ce sont eux qui lors des années 1540 ont sauvé les premiers Blancs d’une mort certaine en leur montrant la vertu de certaines plantes ascorbiques.

Lors de la conquête britannique (1759-1760), la noblesse locale et l‘aristocratie française ont plié bagages et sont retournés en France; alors que les colons sont demeurés sur « leur » territoire où ils jouissaient davantage de libertés, jusqu’à ce que les Britanniques – retors- confient leur âme à la puissante Église catholique qui ne lâcha prise que vers les années 1950, au cours de la Révolution tranquille au Québec.
D’ailleurs, des membres du clergé québécois se sont félicités de la domination anglo-saxonne qui leur a permis d’éviter la révolution française.  « Que Dieu ait leur âme! »
Apparemment, le Canada a fait un bond significatif en s’esquivant du Moyen-Age, à tout le moins politiquement.  Toutefois, dès 1867, date officielle de sa fondation, il était de plain-pied dans une poussée richissime du capitalisme, avec la révolution industrielle.  Toutefois, les États-Unis, son seul et puissant voisin, est désormais au bord de l’abîme impérialiste.  Ce qui n’est guère mieux.  On peut dire que ses habitants sont devenus des esclaves salariés; ou des oiseaux dans une cage dorée; et on « brasse » la cage.  

« Au cours de la période de projection (avril 2018), la composition de la croissance est appelée à changer, la contribution des dépenses des ménages allant en diminuant et celle des investissements des entreprises et des exportations affichant une hausse relative. Le niveau accru des taux d’intérêt devrait concourir à cet ajustement. La Banque (du Canada) s’attend à ce que les politiques monétaire et budgétaire soutiennent l’activité économique durant la période projetée et aident à atténuer l’effet modérateur qu’entraîne, sur les investissements des entreprises et les exportations, l’incertitude entourant les politiques de commerce extérieur et les défis qui se posent sur le plan de la compétitivité. L’inflation se situe près de la cible. Tant le taux d’accroissement de l’indice des prix à la consommation (IPC) que les mesures de l’inflation fondamentale privilégiées par la Banque ont récemment remonté pour atteindre environ 2 %. (Phénomène nouveau ignoré sous le féodalisme et né avec le capitalisme, -ndlr) les facteurs temporaires exerçant des pressions haussières sur l’inflation, à savoir les prix de l’essence et les hausses du salaire minimum, contrebalancent amplement l’effet modérateur décroissant induit par les prix de l’électricité et des aliments. Comme ces pressions haussières devraient persister plus longtemps que les pressions baissières, on prévoit que l’inflation mesurée par l’IPC sera légèrement plus élevée en 2018 qu’on ne l’escomptait en janvier, mais qu’elle retournera néanmoins aux alentours de la cible de 2 % par la suite. » (Banque du Canada, Rapport sur la politique monétaire, L’économie mondiale, Ottawa, avril 2018, page 9)


ANNEXE

photo d'illustration (source: StreetPress)
(Photo d'illustration; source: StreetPress)

(Propos recueillis par Anna Breteau le 4 mai 2018 auprès d’Olivier Cahn : enseignant-chercheur, spécialiste de l'anarchisme et du militantisme violent en France)

 Il n’y a pas eu de telles manifestations (telles celles vécues en France) en Nouvelle-France, colonie prospère; bref, aucune jacquerie.  Mais un Parti rouge que rapporta de France, Louis-Joseph Papineau, et porteur d’idées modernes et avant-gardistes qui furent maintenues vivantes par l’Institut canadien; farouchement battues en brèche par le clergé catholique.

Alors beaucoup s'étonnent du profil social assez "bourgeois" des militants du "Black bloc". Il se révèle en réalité plutôt classique.
 Qualifiés par la droite et l'extrême droite de "racailles de banlieues", les premiers militants "Black blocs" présentés en comparution immédiate après les violences du 1er-Mai présentent un tout autre profil social. Élèves à Centrale, fils et filles de chercheurs au CNRS, d'analystes financiers, etc... Il semble que ces militants appartiennent plus à la classe moyenne ou à la petite bourgeoisie qu'aux classes populaires. Un profil beaucoup moins étonnant qu'il n'y paraît. Olivier Cahn nous livre son analyse sur les militants du "Black bloc" et sa composition sociale.

On entend partout, après les interpellations de militants du "Black bloc" et les premières comparutions immédiates, que le profil social des prévenus "étonne". Est-ce vraiment si surprenant ?
 On pensait que la composition sociale de "Black bloc" avait changé, s'était diversifiée. On avait l'impression que ce mode d'action s'était un peu dépolitisé, s'inspirait moins de la bonne société formée à Sciences-Po. "La composition sociale des interpellés du "Black bloc" n'a rien de nouveau".

Alors que l’intelligentsia progressiste et la bourgeoisie démocratique créaient le mouvement des Lumières (Rousseau, Voltaire, Diderot…) pour extirper du Moyen-Age, sclérosé, la France embourbée dans le fatras économique, conséquent des politiques économiques du règne monarchique; la petite-bourgeoisie canadienne-française se délectait de ses privilèges, vautrée dans le confort que lui procurait le régime colonial anglais; tous… à l’exception des démocrates patriotes des environs de Montréal et ceux, canadiens-anglais, de Toronto.  D’ailleurs, on célèbre ce soulèvement le 21 mai au Québec lors d’un congé férié.    

Cependant, l’empoignade sociale est très vive, surtout parce que la bourgeoisie remet en question les avancées du prolétariat et cherche à contrecarrer les acquis des « manants » du XXIème siècle.  Lénine avait conclu que l’impérialisme est bien l’étape suprême du capitalisme.  Pour Marx, les idées dominantes dans la société sont celles de la classe dominante.  Tous deux ont compris que le communisme l’emporterait sur le capitalisme; non pas comme des prophètes mortifères à la Georges Orwell, mais bien comme des analystes et des acteurs de changement très impliqués, en tant que militants et dirigeants du mouvement communiste international.

Le retour en force du capitalisme en URSS s’est fait sur une courte durée (quelques dizaines d’années); c’est bien peu dans l’histoire humaine.  À l’instar des tables de jeu dans les casinos, la bourgeoisie joue son va-tout; elle est prête à « l’inimaginable », y compris l’anéantissement atomique…  Le recul serait catastrophique :  un nouvel âge de pierre à côté duquel le moyen-âge serait un eldorado.



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