samedi 5 mai 2018

FRANCE: CONFLIT CHEZ AIR FRANCE-KLM.  LE PRÉSIDENT DÉMISSIONNE


Les salariés d’Air France ont voté contre l’accord salarial proposé par la direction à plus de 55,44 %, alors qu’une consultation en ligne avait été lancée le 26 avril. Son patron, Jean-Marc Janaillac, avait son poste dans la balance. Il démissionne.
Le patron d’Air France Jean-Marc Janaillac y avait lié son sort. Les salariés ont rejeté l’accord salarial proposé par la direction à 55,44 % ce vendredi, lors d’une treizième journée de grève. Cette consultation en ligne qui atteint les 80 % de participation est un désaveu pour la direction, qui l’avait organisée. Son PDG a annoncé qu’il démissionnerait lors d’une conférence de presse, quelques minutes seulement après la découverte des résultats.
En annonçant le lancement de ce vote sans valeur juridique, décidé après l’échec des discussions avec les syndicats grévistes, Jean-Marc Janaillac, 65 ans, PDG du groupe Air France-KLM depuis juillet 2016 et président d’Air France, avait averti qu’il quitterait son poste en cas de résultat négatif.

« Ce vote est la traduction d’un malaise »

« J’assume les conséquences de ce vote et je remettrai dans les prochains jours ma démission aux Conseils d’administration d’Air France et d’Air France-KLM », a déclaré Jean-Marc Janaillac face aux journalistes, en regrettant un « immense gâchis ».
Il convoquera le conseil d’administration le 9 mai, selon un communiqué de la compagnie. Eu égard au taux de participation de 80,33 %, Jean-Marc Janaillac a constaté, visage fermé, que « chacun tenait à faire entendre sa voix ».
« Ce vote est la traduction d’un malaise, il appelle une transformation profonde », a-t-il ajouté, espérant que son départ permette « une prise de conscience collective et d’amorcer les conditions d’un rebond ».

Le gouvernement en appelle « au sens des responsabilités »

Le gouvernement « en appelle au sens des responsabilités de chacun » après cette démission du PDG d’Air France-KLM, ont déclaré le ministre de l’Économie Bruno Le Maire et la ministre des Transports Elisabeth Borne.
« Le gouvernement prend acte du résultat de la consultation interne organisée par la direction d’Air France-KLM. Il salue le courage de Jean-Marc Janaillac et le travail de redressement qu’il a mené depuis deux ans au sein du groupe », indiquent-ils dans un communiqué commun.
Jean-Luc Mélenchon, pour La France Insoumise, a eu une réaction ironique, en référence au dirigeant de la SNCF Guillaume Pepy qui fait aussi face à une grève. « Le PDG d'#AirFrance vient d’inventer le référendum révocatoire de patron. Allo, Pepy ? On vote ? », a tweeté Jean-Luc Mélenchon (LFI).

Maintien du préavis de grève

Dans la matinée, le groupe Air France-KLM avait annoncé une perte nette de 269 millions d’euros au premier trimestre, plombé par trois journées de grève (22 février, 23 et 30 mars) d’Air France sur cette période.
Selon la direction d’Air France, 75 % des vols étaient assurés ce vendredi, alors que la mobilisation des pilotes s’effritait avec un taux de grévistes à 21,5 %, contre 33 % au début du mouvement.
Le coût des onze premiers jours de grève est estimé à « 300 millions d’euros » soit un peu plus de 25 millions par jour pour le groupe qui prévoit d’ores et déjà un résultat d’exploitation en 2018 « en baisse sensible par rapport à 2017 », où il avait atteint 1,9 milliard d’euros.
Malgré l’annonce du retrait de l’accord salarial par la direction, les syndicats ont annoncé qu’ils maintenaient leur préavis de grève pour lundi 7 mai et mardi 8 mai. « Nous maintenons nos revendications et continuons d’exiger que de véritables négociations s’engagent enfin », assure l’intersyndicale
Les dix organisations de pilotes (SNPL, Spaf, Alter), d’hôtesses et stewards (SNPNC, Unsa-PNC, CFTC, SNGAF) et de personnels au sol (CGT, FO et SUD) qui la composent réclament 5,1 % d’augmentation en 2018, au titre d’un « rattrapage » nécessaire après six ans de gel des grilles salariales.
Elles avaient rejeté la proposition de la direction prévoyant, pour la période 2018-2021, « des augmentations générales de salaire de 7 % sur quatre ans, s’ajoutant aux augmentations individuelles », dont le versement était conditionné aux résultats financiers.
Philippe Evain, président du syndicat de pilotes majoritaire (SNPL), s’est « réjoui » auprès de l’AFP de l’issue du vote, une « confirmation que les syndicats représentent toujours les salariés ». « Même si nous ne validons pas le procédé », il « nous redonne de la légitimité, à l’inverse du but recherché par la direction », a commenté Christophe Campestre, porte-parole du deuxième syndicat de pilotes (Spaf).

« Période trouble »

Pour Jérôme Beaurain de SUD-Aérien, « les salariés n’ont pas été dupes » car ils réclament une forte augmentation salariale dès 2018, et non un accord pluriannuel. Comme Philippe Evain, il juge Gilles Gateau, le DRH d’Air France, responsable de l’impasse actuelle et non Jean-Marc Janaillac, dont l’intersyndicale n’a jamais demandé le départ.
Le climat social « va rester très dégradé » à Air France, pronostique Marc Saladin de l’Unsa-Aérien, évoquant un malaise plus grand que les salaires. Il y a aussi les « conditions de travail, les postes supprimés et remplacés par de la sous-traitance, de la délocalisation », selon lui.
Les motivations des 20 829 salariés ayant voté « non » sont probablement diverses (refus de la compagnie « Joon » pour les PNC, par exemple), comme l’a souligné Jean-Marc Janaillac lui-même. « Je n’ignorais pas que toute démarche de consultation de ce type comportait le risque que s’expriment, au-delà de la question posée, toutes les insatisfactions et les impatiences, encore nombreuses, dans la compagnie », a-t-il dit.
Pour la CFDT (non-gréviste), son départ « augure d’une période trouble » et d’une « grave crise de gouvernance dont Air France n’a pas les moyens, eu égard à l’environnement économique et concurrentiel » dans lequel elle évolue.

Source:  OUEST-FRANCE

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