La Croix : En Russie, la nostalgie de l’URSS se porte bien 25 ans après
26Déc
Le 25 décembre 1991, les dirigeants des républiques d’Union soviétique actaient la dislocation de l’URSS
À la question « Regrettez-vous la chute de l’URSS », 56 % des personnes interrogées répondent oui, 28 % non, et 16 % ne se prononcent pas, selon un sondage réalisé en novembre par l’institut indépendant Levada.
« Le souvenir des pénuries et de la pauvreté a disparu chez les personnes âgées. Et l’image idéalisée de l’époque soviétique sert de comparaison pour critiquer la situation actuelle », relève le directeur du centre Levada, Lev Goudkov.
Des jeunes nostalgiques
La jeune génération, elle, a du mal à se faire une idée de ce qu’était l’Union des Républiques socialistes soviétiques, dirigée pendant plus de 70 ans par un parti unique (le parti communiste) à l’idéologie marxiste-léniniste, sans liberté politique ou religieuse, avec une répression qui a fait des millions de morts, fusillés, envoyés au Goulag ou exterminés par la faim. « Les jeunes disposent d’une image très empreinte de nostalgie transmise par l’ancienne génération ou des clichés idéologiques véhiculés par la télévision », regrette Lev Goudkov.Que penser de l’URSS 25 ans après ? Le patron du groupe de presse d’État Rossia Segodnia, Dmitri Kisselev, a donné le ton à la mi-décembre sur la TV Rossia 24 : « Le but était de réaliser le paradis sur terre. On a réussi à faire beaucoup. » Il s’agissait d’une « expérimentation sociale grandiose », a-t-il ajouté dans un reportage intitulé « L’expérience bénéfique de l’URSS ».
Une image positive
À la télévision comme au cinéma, de nombreux films donnent une image positive de l’Union soviétique, que ce soit des documentaires consacrés aux anciens dirigeants Léonid Brejnev et Iouri Andropov ou une série qui passe actuellement sur la première chaîne, « Une passion secrète », où les agents du KGB chargés de traquer les dissidents sont présentés sous un jour favorable.À l’opposé, ceux qui s’occupent aujourd’hui des pages sombres de ce « passé lointain », comme l’ONG Memorial qui étudie les répressions sous le régime soviétique, de 1917 à 1991, sont régulièrement accusés de se livrer à des activités « non patriotiques ».
En entretenant le « mythe soviétique », les autorités espèrent « opposer la Russie au reste du monde » pour mieux justifier sa politique de « citadelle assiégée », estime l’historien Nikita Petrov, de l’ONG Memorial.
L’URSS a cessé d’exister et le communisme n’est plus l’idéologie officielle mais des milliers de rues et de monuments honorent toujours en Russie la mémoire des bolchéviks, à commencer par Lénine.
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Le corps embaumé du chef de la révolution de 1917 et fondateur de l’État soviétique repose encore aujourd’hui dans son mausolée sur la place Rouge, devant les murailles du Kremlin, à quelques mètres de la tombe de Staline.
« En gardant la symbolique de l’époque soviétique et en laissant Staline et Lénine sur la place Rouge, les autorités veulent créer un lien allant des princes russes jusqu’au secrétaire général du parti communiste de l’URSS pour dire qu’il s’agit toujours de la même Russie sous des incarnations différentes », estime Nikita Petrov.
Le politologue pro-Kremlin Dmitri Orlov rejette cette vision des choses : « Les autorités ne cherchent pas à réhabiliter l’URSS. Lénine et Staline sur la place Rouge, c’est un fait sans importance. Pour la jeune génération, le mausolée, c’est comme les pyramides égyptiennes, un passé lointain ».
En 2005, Vladimir Poutine avait résumé son credo : « La chute de l’URSS a été la plus grande catastrophe géopolitique du siècle ». Peu après, il avait ajouté : « Celui qui ne regrette pas la chute de l’Union soviétique n’a pas de cœur. Et celui qui veut la reconstituer n’a pas de cerveau. »
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