La Nouvelle Vie Réelle
samedi 28 mars 2020
Le premier du mois
Aurélie Lanctôt
27 mars 2020
CHRONIQUE
C’était encore abstrait la semaine dernière. Le spectre du licenciement massif planait sans s’être concrétisé. C’est désormais bien réel. Le premier du mois arrive et pour des centaines de milliers de Québécois, l’argent n’arrivera plus. « Si j’ai à choisir entre le loyer et nourrir mes enfants, je vais nourrir mes enfants », disait à la radio une femme tout juste licenciée.
Ici et là, on voit apparaître des draps blancs suspendus aux fenêtres, qui semblent voiler pudiquement la brutale matérialité de la crise, qui désormais ne s’incarne plus qu’à travers des hypothèses et des inquiétudes, mais également à travers la nourriture qu’on met ou non sur la table. Ces étranges rideaux sont l’étendard de la grève des loyers, un mouvement spontané qui se répand un peu partout où la pandémie fragilise des vies qui déjà tenaient en équilibre grâce à des prouesses de funambule. On réclame l’annulation du paiement des loyers, la mise sur pied d’un fond pour dépanner les locataires, on espère en somme forcer une redistribution qui tarde.
Évidemment, cela sème la panique chez les propriétaires, qui ont une hypothèque à payer, disent-ils, soulignant qu’il faut plutôt s’entendre avec les banques, que ce n’est pas à eux de porter individuellement cette responsabilité. Ils ont bien raison. C’est exactement le principe de toute grève : faire monter la tension par la base, construire un rapport de force pour faire fléchir les institutions où se concentre le pouvoir. Personne ne leur demande de porter individuellement cette responsabilité. On les presse au contraire d’emboîter le pas.
Au même moment, voilà le gouvernement Legault qui adopte le ton guerrier de ses homologues français, allemand, américain et de tant d’autres. « On a une espèce d’armée de 8,5 millions de personnes. Ça risque d’être la plus grande bataille de notre vie », déclarait-il mercredi, anticipant que les Québécois en tireraient un jour une grande fierté.
Je ne vois pas quelle fierté il y a à tirer du recours à cet imaginaire belliqueux. Le vocabulaire de la guerre est surtout utile à quiconque cherche à accroître sa capacité d’agir sans rencontrer de résistance. Cette logique sert à monopoliser l’attention politique pour décréter un consensus qui dépolitise d’un coup toutes les autres tensions qui traversent la société, au moment même où les clivages et les luttes pour l’attribution des ressources et des occasions sont plus vitales que jamais. Les pulsions autoritaires se présentent souvent avec les mots de la bienveillance. On l’a vu ailleurs. Rien ne nous en garde ici.
Autre trait curieux, on semble soudain tenir comme une évidence que la valeur de la vie humaine est inestimable, ce qui constitue le point de chute de toutes les restrictions administrées. Il faut bien sûr tout faire pour ne pas laisser la maladie se répandre ; le confinement, l’arrêt du commerce et de la circulation, tout. Au chapitre sanitaire, nous faisons exactement ce qui s’impose. Mais n’allons pas croire que nous le faisons parce que dans nos sociétés, la vie humaine n’a pas de prix. On quantifie au contraire sans cesse la valeur des vies, nos économies reposant avant toute chose sur des calculs de risques, d’utilité et sur le sacrifice du plus vulnérable, de celui qui nous ralentit. Ce n’est pas moins vrai aujourd’hui.
Encore la semaine dernière, le premier ministre
Justin Trudeau
annonçait qu’on renverrait aux États-Unis les migrants irréguliers se présentant à la frontière, admettant que cela faisait « plusieurs années qu’on était en discussion avec les Américains pour tenter de trouver une mesure comme celle-ci. » On connaît pourtant les conditions de détention inhumaines des installations des autorités frontalières américaines. Récemment, le
podcast
de la NPR
Latino USA
rapportait l’histoire d’un homme tombé malade dans les prisons de l’Immigration and Customs Enforcement (ICE). On l’a placé en isolement dans une cellule si froide qu’au bout de quelques jours, il tentait de boucher des trappes d’aération avec du papier de toilette pour ne pas mourir de froid. En décembre, les autorités de l’
immigration
ont empêché des médecins d’administrer des vaccins contre la grippe aux enfants détenus dans les camps près de San Diego. Depuis, les conditions de détention se détériorent et la propagation de la COVID-19 est inévitable, au point où des migrants détenus dans le New Jersey ont entamé la semaine dernière une grève de la faim pour protester. C’est vers cela qu’on envoie les gens et on le sait très bien. Si la valeur de la vie était inestimable, personne ne serait abandonné à ce sort.
Oui, on sacrifie tous les jours la vie des gens qui ne peuvent pas payer le loyer, qui se présentent aux frontières par désespoir, qui ne sont pas autonomes, qui ne peuvent pas travailler ou qui travaillent, mais qui crèvent de faim quand même, des gens qu’on entasse dans des réserves ou des taudis ; de tous ceux qu’on laisse mourir à petit feu parce que leur vie ne passe pas l’épreuve du calcul. Le premier du mois arrive, mais pour beaucoup, il arrive chaque fois avec autant de violence. C’est peut-être à une trêve de ces sacrifices qu’appellent les draps blancs suspendus aux fenêtres.
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Clermont Domingue -
Abonné
27 mars 2020 03 h 44
o
Valeur de la vie.
Telles valeurs fluctuent énormément, comme les actions en bourse.Si vous êtes un prématuré blanc de la région de Montréal, on mettra des dizaines de milliers de dollars pour vous garder en vie, même au risque de faire de vous un handicapé pour des décennies.Par contre, si vous naissez prématurément dans une campagne pauvre d'Afrique, vos parents accepteront votre mort et donneront la vie à un autre bébé.
Vous avez quatre -vingt-cinq ans et vous attrapez la covid-19. Si vous habitez Sherbrooke, on sortira l'arttillerie lourde pour vous garder vivant.
Une adolescente attrape le paludisme au Gabon et en meurt,c'est normal.
Oui, la bourse du vivant est très volatile. Pour le moment, la vie vaut plus dans les campagnes de l'Estrie que dans la ville de New York.
Si la covid-19 amenait des centaines de millions de personnes à une conscience planétaire elle aurait été très utile.
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Charles-Étienne Gill -
Abonné
27 mars 2020 10 h 08
§
Ça prend une communauté pour de la solidarité, c'est le point de la question de la guerre, nonobstant les remarques de Madamde Lanctôt. Madame Lancôt, même avec ses cas « concrets » de ce qui se passe au Sud néglige le fait qu'une communauté qui peine (c'est l'objet de sa chronique) à se solidariser complètement (c'est son exemple de la grève) pour elle-même ne peut se mettre à déployer de la solidarité pour des gens qui n'en font pas partie tant que les éléments les plus faibles du groupe ne seront pas aidés. Mon ami est entrepreneur, il a tout misé pour démarrer une entreprise, mais en même temps que la crise. Il a payé des impôts et des taxes toute sa vie, son entreprise est son emploi et elle devait fournir des emplois à d'autres. L'aide de nos gouvernements et notre propre solidarité seront insuffisante pour lui, je le crains.
Alors pourquoi continuer à accueillir 15 000 migrants par le Chemin Roxham quand on sait que c'est irrégulier et que du lot un nombre important sont des migrants économiques, pas des réfugiés et qu'ils «embourbent» de ce fait le système? À cause de la cruauté des États-Unis? Même en tant «qu'illégal», de «clandestin», «d'irrégulier», les États-Unis sont un tiers-pays sûr. Ils ne le sont pas s'il y a une menace de déportation vers un autre pays, mais ça demeure hypothétique; c'est en raison d'un problème de statut qui hier encore ne les inquiétait pas outre mesure que le Chemin Roxham a été pris d'assaut à partir de 2017. Ensuite, c'est parce que c'était une passoire connue que d'autres sont passés par New York pour y venir en masse. Plus de 15 000 par année, en moyenne, depuis 2017. Tout ce qu'on fait, c'est rendre la situation normale, comme si Roxham était une frontière, enfin régulière, et non un non-lieu. Autrement on confère un « droit d'asile » à quiconque «peut» venir, mais c'est arbitraire en fonction des moyens de ceux qui le tentent et pour le justifier on invoque la cruauté d'un autre, c'est du chantage.
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Clermont Domingue -
Abonné
27 mars 2020 11 h 12
§
VALEUR de L'ARGENT. La BANQUE DU CANADA vient d'annoncer qu 'elle fixe sont taux d'escompte à 0.25%. Le taux d'escompte, c'est le taux d'intérêt que les banques commerciales paient à la banque centrale ( BANQUE DU CANADA) quand elles lui empruntent de l'argent.
Si la banque commerciale obtient les $$$ qu'elle veut au taux de 1/4 %,pourquoi le client irréfléchi paierait-il 19% à la banque qui finance son nouveau lave-vaisselle?
Je propose: 1- Que par décret le gouvernement du Canada fixe à un maximum de 5% le taux d'intérêt exigible sur les cartes de crédit.
2- Que le gouvernement fédéral maintienne intégralement le revenu de chaque Canadien (e) pendant toute la durée de la crise.
o
Cyril Dionne -
Abonné
27 mars 2020 18 h 37
§
M. Domingue,
Les taux d’intérêts sont à leur minimum parce que tous craignent que les marchées et l’économie mondiale s’effondrent. Ils essaient par tous les moyens de garder les avoirs intacts des particuliers et des entreprises, mais ceux-ci déclinent à tous les jours. Si cette journée arrive, les gouvernements ne pourront plus emprunter de l’argent pour subvenir aux besoins de leurs citoyens durant cette crise. En plus, toutes les économies des particuliers, des fonds de pension comme la Caisse de dépôt du Québec qui a déjà perdue un tiers de sa valeur, vont s’envoler en fumée. Il n’y aura presque plus d’argent pour le filet social. En plus, l’inflation commencera à grimper parce qu’ils n’ont plus de marge de manœuvre avec les taux d'intérêts et les prix des denrées comme la nourriture, vont monter en flèche. Et on parle de 25% et plus de chômage pendant un an et plus.
Pour continuer, personne ne force personne à prendre des cartes de crédit pour s’endetter en s’achetant toutes les « bébelles » du monde à crédit. Personne. Si vous diminuez les taux d’intérêts sur ceux-ci, OK, mais les gens devront s’acquitter de leur dette sinon c’est tout le système qui s’arrêtera. Maintenir le revenu de chaque Canadien et Canadienne artificiellement est tout simplement une utopie. Ici, on ne parle pas juste de quatre mois, mais plutôt de six mois et plus puisque les experts nous disent que la moitié de la population va être contaminée (certains avancent jusqu’à 80%). On parle d’une période d’un an et d’une 2e vague plus mortelle de ce virus qui sera probablement en mutation et les vaccins n’auront aucun effet où seront trop tard.
Maintenant, certaines grandes âmes qui ne paient presque rien au système nous disent qu’on devrait s’occuper d’illégaux qui viennent d’un pays sûr pour profiter des avantages sociaux qui sont donnés gratuitement. N’est stupide que la stupidité. On commencera à s’occuper des gens de chez nous avant de s’occuper d’étrangers.
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Marc Therrien -
Abonné
27 mars 2020 07 h 49
o
La santé, la santé, c'est pas une raison pour souffrir autant
C’est là qu’on voit qu’il vaut mieux travailler pour l’état voire même être l’état plutôt que pour l’entreprise privée, mais on ne voudrait quand même pas devenir un régime communiste et plusieurs craignent que Québec Solidaire gagnent plusieurs votes en 2022. Après avoir vidé les organismes communautaires de leur bénévoles âgés de plus de 70 ans pour les protéger à tout prix, voilà que le bon Gouvernement Legault encourage les chômeurs à faire du bénévolat dans les organismes communautaires. Bien évidemment, on sait que les membres du gouvernement seront les derniers à se sacrifier et il ne saurait être question qu’ils se licencient eux-mêmes pour gouverner bénévolement pour le bien commun.
Marc Therrien
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Jean Duchesneau -
Abonné
27 mars 2020 09 h 32
§
Relisez cette phrase 7 fois... et tentez d'y trouver un minimum de bon sens!
"Bien évidemment, on sait que les membres du gouvernement seront les derniers à se sacrifier et il ne saurait être question qu’ils se licencient eux-mêmes pour gouverner bénévolement pour le bien commun."
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Hélène Lecours -
Abonnée
27 mars 2020 09 h 37
§
Reste que le gouvernement communiste chinois et autoritaire à souhait à fait beaucoup mieux que ceux d'Europe et d'Amérique du nord. (Il faut parfois être autoritaire). Ils ont pris des mesures que nous ne prendrons jamais, tel désinfecter les rues, les monuments, les bâtiments. Les USA sont les plus pauvres organisateurs jamais vus et leur gouvernement fait passer l'argent bien avant le vie...des autres.
o
François Poitras -
Abonné
27 mars 2020 12 h 37
§
S'il est un risque de pénurie dont il ne faut s'inquiéter pendant la pandémie, c'est celui de la morale à deux balles que ne cesseront de servir les idéologues patentés.
o
Marc Therrien -
Abonné
27 mars 2020 22 h 42
§
M. Duchesneau,
Il me semble évident que vous n’éprouvez pas le même plaisir que moi à jongler avec l’insensé quand presque tout ce qui avait du sens prend le bord. À mesure que cette crise progresse et que le triumvirat Legault-Arruda-McCann nous demandent de rester calmes dans la panique, j’ai plus que jamais l’envie d’agir pour que tout un chacun arrive à « ne jamais consentir à être tout à fait à l’aise avec ses propres évidences » comme le disait Maurice Merleau-Ponty.
Marc Therrien
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François Poitras -
Abonné
27 mars 2020 08 h 02
o
Ordures
Le détournement de sens des propos du premier ministre que bricole Aurélie Lanctôt rappelle l’aphorisme du sémiologue Jean Baudrillard, voici (de mémoire) : « Un homme saute dans une benne de déchets en criant « je suis une ordure, je suis une ordure ». On le sort. Il y replonge et lance à nouveau « je suis une ordure, je suis une ordure ». Le philosophe commente : « cet homme a perdu le sens de la métaphore »
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Charles-Étienne Gill -
Abonné
27 mars 2020 10 h 33
§
Elle a raison de se méfier de rhétorique belliqueuse, mais qu'en est-il de ses propres sources militantes?
On sait par exemple que diverses organisations, contestant les mesures de Trump qui s'adressaient à l'immigration irrégulière, ont organisé des mouvements et facilité des initiatives pour nuire aux mesures du président, comme les fameuses caravanes. Cela accroit la pression sur les différents services du gouvernement, mais à mesure que la pression diminue sur les agences de surveillance frontalière ou d'immigration, plus de cas sont traités. Certes les demandeurs d'asile devraient avoir des droits, peu importe si leur demande est faite dans un contexte d'entrée irrégulière ou régulière, mais quand le nombre est tel que c'est la dynamique complète du rapport à l'immigration qui est menacée, les États et particulièrement les États-Unis, aux prises avec des problèmes sociaux graves qu'ils peinent à régler, ont aussi le droit de prendre des mesures pour préserver l'intégrité de leurs institutions.
Ainsi, le pt de vue américain c'est que si vous franchissez illégalement ou si vous aidez à le faire, vous venez nous perturber (car il faut trier entre les fausses demandes, il faut parfois vous soutenir et il y a aussi des éléments criminels qui entrent que nous devons contrôler), vous serez possiblement incarcéré. Passez par une voie régulière, c'est encore parfaitement possible d'immigrer aux États-Unis.
On peut être contre ce cours d'action, mais c'est la proposition légitime que le peuple américain a voulu mettre en place en mettant Trump au pouvoir en 2016, les Américains ont le droit, au nom justement de la vie, de contrôler l'allocation des ressources qu'ils envoient au gouvernement et de décider ce qu'il en fait. Je peine à comprendre comment on pourrait soutenir nos systèmes si on ouvrait nos frontières complètement : est-ce que tous les citoyens de tous les pays nous financeraient en contrepartie?
o
François Poitras -
Abonné
27 mars 2020 20 h 48
§
J'apprécie généralement vos analyses M. Gill. Mais l'utilisation du mot « guerre » par le Premier ministre n'est en rien belliqueux. Il s'agit plutôt d'une formule visant à susciter l'engagement de la population. Évidemment Mme Lanctôt interprète cela de façon outrancière. Car les Mme Lanctôt de ce monde croient que leurs chapelles idéologiques détiennent le monopole de la mobilisation citoyenne. Une illusion, évidemment. Ainsi, qu'un premier ministre pertorme à rassembler les gens les amène à une lecture totalement intégriste du moindre propos. Comme tous les profs de morale nihiliste
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Diane Gervais -
Abonnée
27 mars 2020 08 h 03
o
D.G.
Merci pour ce très beau texte ! D.G.
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Pierre Rousseau -
Abonné
27 mars 2020 08 h 13
o
De l'utilité de la guerre
En temps de guerre on crée des boucs-émissaires pour dévier l'attention du public loin des activités des dirigeants et, surtout, de leurs erreurs. Le recours à la « militarisation » de la pandémie permet aussi de cibler des groupes de personnes, ici les voyageurs et les aînés, comme boucs-émissaires qui permettent aux dirigeants de récolter des taux de satisfaction dignes des pires dictatures. Pour les dirigeants, c'est une assurance contre les erreurs de parcours alors que l'attention se porte surtout sur les boucs-émissaires qu'on prétend ne pas respecter les consignes des autorités alors que la très grande majorité le fait. L'escalade contre ces groupes de citoyens est à prévoir alors que les manques du système de santé n'attireront pas l'attention et la courbe de progression de la pandémie suivra son cours.
o
Jacques Houpert -
Abonné
27 mars 2020 12 h 59
§
Les voyageurs des boucs-émissaires ? Les ainés des boucs-émissaires ?
Tenons-nous en aux faits et non à l'interprétation tordue que vous en faites. Le voyageur est le support qu'utilise le coronavirus pour infecter des populations où ce virus n'était pas présent. Le voyageur est un agent potentiel d'infection. Il est du devoir des autorités gouvernementales de protéger les voyageurs des conséquences d'une maladie dont ils risquent d'être atteints et de protéger tous ceux qu'ils risquent de contanimer. Quant aux ainés, il n'y a que les sots pour confondre le fait qu'ils soient plus à risque de mourir du coronavirus et le fait qu'ils soient plus à risque de le transmettre.
Jamais François Legault n'a incité qui que ce soit à entrer en guerre contre les voyageurs et les ainés.
Affirmer le contraire est faire preuve de désinformation à des fins idéologiques.
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